

Ouverte à Lyon en 2018, cette salle d’activité physique adaptée (APA) veut créer le lien entre sport, handicap et recherche scientifique. Appareils de musculation et de renforcement musculaire adaptés aux fauteuils (et parfois bricolés pour être vraiment adaptés), appareils d’électrostimulation musculaire, ateliers marche et verticalisation en dehors d’un centre hospitalier ou de rééducation… Le principe n’existait pas alors que les besoins de bouger pour la santé des personnes en situation de handicap est primordial. On vous explique.
« Les risque de décès suite à des maladies cardio-vasculaires sont dix fois plus élevés chez les personnes avec un handicap neuromoteur que chez les valides. Si nous faisons de l’électrostimulation deux à trois fois par semaine, nous arrivons au même niveau de risque qu’un valide sédentaire qui ne fait pas de sport », nous explique Julien Jouffroy, vice-président de l’association ANTS (pour Advanced neuro-rehabilitation therapies and sport). « Et pendant l’épidémie de Covid, on a prouvé notre utilité. Faire du sport régulièrement permet de faire circuler l’air dans le sang, dans les tissus et de changer de position. Le premier confinement on a dû fermer. Six personnes qui venaient régulièrement chez nous ont fait des escarres (des plaies cutanées dues à une pression répétée sur une partie du corps), alors qu’elles n’en faisaient pas avant en venant à la salle. Une a même dû être amputée. Une escarre peut guérir si on soigne bien la plaie, si on ne fait plus d’appui dessus, si on a des salles pour se mettre debout parfois, ou autre. Heureusement, au deuxième confinement, on a pu rouvrir » poursuit-il.
« On voit aussi et surtout des résultats sur le moral, ça fait du bien aux gens de venir ici, de croiser d’autres personnes qui comprennent ce qu’ils traversent, de partager des astuces », complète Mathilde Ranc, responsable de la salle S.P.O.R.T (pour stimulating people and organizing recreational therapies). Alex, adhérent présent ce jour-là confirme : « Je viens ici pour garder la forme. C’est agréable d’être entouré de coachs qui connaissent le handicap et prennent en compte nos besoins, possibilités et objectifs. Cela m’aide dans la gestion de l’effort et à me sentir mieux dans mon corps. »
Prendre soin des corps, faire des recherches sur l’électrostimulation
Au-delà de l’aspect sport-santé, l’association ANTS, de par son histoire, est en lien avec la recherche médicale et des études sont menées dans la salle, auprès des adhérents. « Vous avez remarqué que nous nous trouvons dans les locaux de l’Ecole normale supérieure (ENS). C’est parce que le créateur de l’association, Vance Bergeron, était directeur de recherche au Laboratoire de physique ici. En 2013, il devient tétraplégique (paralysie des quatre membres) des suites d’un accident de vélo. En 2015, il crée l’association ANTS avec d’autres tétras passionnés de sport et de défis. L’ENS lui a même permis de réorienter ses recherches sur l’électrostimulation. On a fait un an de rééducation ensemble. Il a étudié toutes les recherches scientifiques sur la possibilité de remarcher grâce à l’électrostimulation. Mais elles ont toutes été abandonnées car les résultats n’étaient pas suffisamment impactant. Mais pour nous, regagner 2 à 5 % de nos capacités, c’est énorme ! Et ça peut nous permettre de faire des choses avant impossibles. Et puis le travail avec ces électrodes a d’autres bénéfices notamment cardio-vasculaires et sur les escarres comme mentionné précédemment. Aujourd’hui Vance est rentré aux Etats-Unis mais on continue de suivre les avancées. La combinaison Neuroskin, par exemple, me semble plus efficace pour espérer récréer des mouvements de marche pour les tetras ou les paraplégiques (paralysie des 2 membres inférieurs). Nous les testons à Lyon et à Grenoble, dans notre nouvelle salle », explique Julien Jouffroy
Aujourd’hui, la salle de Lyon accueille environ 1/4 de blessés médullaire (paraplégie liée à la moelle épinière), 1/4 d’hémiplégiques (paralysé d’une moitié), 1/4 de scléroses en plaques, et 1/4 d’autres situations dont des valides avec un déficit moteur temporaire. « L’APA a d’ailleurs de très bons résultats dans la rééducation post-cancer » souligne Julien Jouffroy. L’association recherche des financements pour acquérir des appareils adaptés, recruter un nouvel enseignant en APA permettant d’ouvrir d’autres créneaux et d’accueillir plus de monde ; et pourquoi pas se développer nationalement.
Jonathan Corcessin et Laurianne Ploix