A l’occasion du dossier du mois sur le pouvoir du cinéma et de l’image animée, TVB a rencontré le lyonnais Vincent Verzat, l’un des nombreux acteurs pour la transition vers une société solidaire et durable qui ont opté pour le format vidéo.
TVB : Bonjour Vincent, merci beaucoup d’avoir accepté l’interview. Peux-tu te présenter brièvement à nos lecteurs ?
VV : Bonjour, je suis Vincent Verzat, j’ai 26 ans, je suis vidéaste activiste indépendant et également YouTubeur. Je travaille essentiellement sur des vidéos qui traitent de causes qui me sont chères. J’essaie de mettre l’accent sur l’enjeu de notre époque : la lutte contre le changement climatique, principalement dû aux activités humaines. En ce moment, je travaille par exemple avec 350.org qui s’engage pour le désinvestissement des combustibles fossiles. En parallèle, je suis également formateur à la communication bienveillante.
TVB : Comment en es-tu arrivé à ces deux activités plutôt complémentaires ?
VV : Avant tout chose, j’ai suivi des études de diplomatie internationale. Je me destinais plutôt à être ambassadeur d’ONG pour la paix. Finalement, j’ai fait ça une journée, et ça ne m’a pas plu du tout. Je me suis plutôt tourné vers l’éducation à la paix. Avec un ami, à l’époque, nous avons lancé une association » Paci cultura ”, pour la culture de la paix. Nous sommes partis au Costa Rica avec un projet pour l’Université de la Paix. J’ai rédigé un concept de 16 vidéos pendant 3 mois, qui a dans un premier temps été refusé par le recteur. Je me suis battu pour qu’il accepte de lancer le projet. J’étais parti au Costa Rica avec une caméra tout fraîchement acquise, je comptais bien m’en servir ! Il a fini par donner son accord : c’est de là que sont nées mes toutes premières vidéos professionnelles.
TVB : Tu n’étais donc pas formé à l’audiovisuel quand tu t’es lancé ?
VV : Pas du tout. A la base, quand j’avais 16 ans, je faisais des vidéos pour mon plaisir personnel : des vidéos de sport. C’est à 20 ans que j’ai fait le grand saut et transformer cette passion pour proposer autre chose. Ce projet au Costa Rica a tout déclenché, les vidéos ont plu. Tout s’est enchaîné assez naturellement : le lendemain de mon retour en France, je suis spontanément allé filmer le tour à vélos d’Alternatiba. Ils ont apprécié la proposition.
TVB : Pourquoi avoir choisi l’audiovisuel pour défendre les causes qui t’importent ?
VV : Je savais que c’était le format le plus consommé sur Internet internationalement. Mais, évidemment, les sujets sérieux ne sont pas les plus abondants sur la toile. Il y avait donc quelque chose à creuser.
TVB : Initialement, tu étais donc plutôt axé sur la vidéo. Quand as-tu décidé d’ajouter à ton travail la dimension YouTubeur ?
VV : Ce n’est pas du tout quelque chose que j’avais prévu. En novembre 2015, suite aux attentats de Paris, j’ai écrit ma toute première vidéo face caméra. En réaction au traitement médiatique qui en avait été fait. J’étais frustré, j’avais beaucoup de choses à exprimer. Cette vidéo spontanée est la résultante d’une discussion très virulente entre un ami et moi. Bizarrement, ce format complètement improvisé a eu un écho incroyable : il a parlé à de nombreuses personnes autour de moi. Tout d’abord, des amis qui étaient étonnés de me voir prendre la parole sur Facebook, et d’exprimer une opinion très sérieuse à travers ce média. En quelques temps, ils ont partagé la vidéo des centaines de fois. Elle est sortie du cercle privé très vite, elle a parlé à un très grand nombre. Aujourd’hui, je crois qu’elle a atteint le million de vues.
TVB : Peux-tu nous expliquer ce que tu fais concrètement ?
VV : Je propose trois types de travaux : le premier, la création de vidéos “ tournées-montées ” dans la journée, un wrap-up en anglais, c’est à dire, un retour en image de deux minutes sur un événement. Le second, des teasers de mobilisation : en regroupant quelques images récupérées sur le net, je rends un format composé à 100% à partir d’un montage vidéo, pour donner envie de participer à une manifestation, un événement engagé. Enfin, le dernier, c’est tout récent : depuis cette année, je propose des vidéos de fiction qui répondent à un problème, une situation, un enjeu réel.
TVB : Qu’apporte la fiction à ton travail ?
VV : Elle rend l’enjeu intelligible à tous, notamment à travers l’humour. J’essaie de faire des vidéos qui se partagent sans problème. En prenant comme indice mon petit cousin de 14 ans : s’il partage une de mes vidéos, c’est que le pari est réussi. Le message est sérieux, la forme le rend accessible. Sur Facebook, qui est mon moyen de communication favori, le paraître prend beaucoup de place : on peut facilement regarder une vidéo qui nous parle, moins facilement la partager. Car cette action dit quelque chose sur nous, exprime nos combats. En partageant une vidéo, nous prenons position publiquement. Avec l’humour et la fiction, il est plus facile de faire entendre sa voix, à travers celle d’un.e autre.
TVB : En dehors de l’indice “ petit cousin ”, comment mesures-tu l’impact de tes vidéos ?
VV : C’est une des choses qui me manquent. Je peux mesurer le “succès” d’une vidéo au nombre de partages. Mais ça ne me suffit pas, j’aimerais pouvoir convertir chaque partage en engagement. Jusqu’ici, un partage me paraissait déjà énorme, j’aimerais désormais aller plus loin et être capable de faire agir chaque nouvelle personne qui publie ou visionne mon contenu. Pour le moment, mes vidéos sont largement plus partagées qu’elles ne sont “ aimées ”. Ce qui est déjà une bonne chose.
TVB : Sais-tu comment tu pourrais arriver à transformer chaque partage en action ?
VV : Je pense que la clé, c’est la transparence. Il faut que je sois plus clair encore sur le but précis de mes vidéos. Ne pas hésiter à répéter ce qui est proposé concrètement.
TVB : Pour finir, aurais-tu un conseil pour nos lecteurs ?
VV : J’en aurais deux : d’une part, ne pas hésiter à partager les choses qui vous touchent, articles ou vidéos, mais surtout d’expliquer en quoi ça vous parle. Partager, c’est sympa, ça permet d’initier un dialogue. Ensuite, d’essayer de voir plus loin que la prochaine tête du chef de l’Etat pour se concentrer sur les enjeux environnementaux, sociétaux et sociaux qui nous concernent tous. Dans le tourbillon politique actuel, on ne peut pas les oublier et ne parler que de croissance et de PIB…
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Propos recueillis par
Johanna Samiotakis
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